Aujourd’hui nous voulons vous raconter une histoire, ou plus exactement une rencontre. Un samedi pluvieux comme Paris sait en faire, nous poussons la grille d’entrée d’une maison dans une ruelle pavée. Nous poussons la grille et entrons dans un monde de nouvelles perceptives, celui où nous accueille Pierre Zanzucchi. Son étourdissante générosité rivalise avec sa soif de nous faire découvrir son travail. Et quel travail ! Nous nous sommes vues servir un festin de connaissances. Alors forcément, nous, on ne peut pas garder ça pour nous. Rencontre avec un peintre qui est avant tout un homme de plain-pied dans la vie. A.L : Merci de nous recevoir. Lorsque l’on vous parle de peinture l’on vous voit des étoiles plein les yeux. Pourquoi peindre ? P.Z : La peinture, c’est un tout ! Un peu comme un déjeuner (et nous assurons que le déjeuner est une affaire aussi sérieuse que délicieuse pour Pierre Zanzucchi, ndlr). Ce sont des situations qui s’amorcent et se révèlent secondes par secondes. Lorsque j’étais enfant, je me rappelle de l’étonnement de ne plus voir des adultes que j’aimais bien. On me les disait partis, sans me dire où, sans me donner une date de retour. Cette notion de disparition s’appelait la Mort et ma question fut : quelle route de vivant est la mienne ? La peinture, le dessin se sont révélés comme mon chemin propre. La peinture, c’est une source intense et primitive d’énergie et d’émotions, tellement vivante qu’elle outrepasse et transcende la disparition. Je me souviens qu’un jour au Louvre, enfant, j’ai pu toucher le bas du tableau le Sardanapale (La Mort de Sardanapale d’Eugène Delacroix, ndlr). Il y a eu une sublime transmission d’énergie. Qu’y-avait-il dans cette matière-lumière ? "La peinture, c’est une source intense et primitive d’énergie et d’émotions tellement vivante qu’elle outrepasse et transcende la disparition" A.L : Quelles sont vos sources d’influences, vos inspirations ? P.Z : On ne se lève pas le matin en se disant : tiens, aujourd’hui je suis inspiré ! Les sources des d’influences sont imprévisibles. Elles se présentent sans frapper à la porte. C’est après, bien après… peindre c’est inventer des formes de liberté, c’est l’incarnation de la lumière dans la matière, il n’y a ni explication ni définition. C’est exactement comme le disait Malraux : « L’art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort ». Je vois la peinture comme un surgissement. ![]() A.L : Vous avez un jour déclaré qu’« il n’y a pas de chronologie dans la vie d’un peintre, il n’y a que des évènements ». Un en particulier a-t-il orienté votre travail ou vous a-t-il marqué ? P.Z : Oui bien sûr, ce sont les évènements qui importent avant tout. Mais les évènements informels. Une rencontre peut surgir de n’importe où. Par exemple, dernièrement, lorsque j’ai eu accès à un herbier décomposé (l’herbier dont la poussière organique a été transmuée par Pierre Zanzucchi en œuvres picturales exposées de mai à octobre 2017 au Musée de l’Histoire de la Médecine et à la Société Nationale d’Horticulture de France, ndlr), ce fut un évènement instantané pour mon regard. J’ai décidé de le conserver afin de réveiller l’âme de la plante, d’en révéler le mystère. Il n’y a aucune préméditation à mon travail, il s’agit de saisir les choses qui arrivent sans le savoir. Il faut être en éveil, c’est le propre de l’invention et du chemin artistique. C’est d’aller vers l’inconnu en permanence. A.L : Votre atelier comporte en outre un jardin. Quel est votre rapport à la nature ? P.Z : Ici dans le jardin le silence prend place, l’ombre du silence aussi. La nature me permet de voir en peintre, la nature m’étonne. Comme on peut le voir dans mes aquarelles, la nature c’est l’émotion de l’instant. Il n’y a pas de méthodologie en peinture ; il y a bien une technique, mais ce n’est pas l’essentiel. A.L : Peindre n’est pas, semble-t-il, qu’un acte individuel selon vous. Quel est votre rapport à l’autre dans l’acte de peindre ? P.Z : La création est en effet un échange. Je peins pour offrir, pour les autres. Il s’agit de participer à la collectivité. On ne sait rien, on fait. C’est tout. C’est l’Histoire qui nous dit si l’on est artiste ou si l’on fait une œuvre d’art. C’est une question de persévérance. Peindre c’est donner une chance aux couleurs, offrir l’exemple du bonheur, une ode à la vie. A.L : votre mot de la fin ? P.Z : Soyez toujours en émerveillement. Written by Agathe ![]() Les commentaires sont fermés.
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